Rapidement après l’adoption de la loi ayant institué le droit à l’aide sociale, une lutte contre les fraudeurs a été mise en place. Dans les années 1980, leur pouvoir s’est renforcé. Surnommés « les boubou-macoutes », ces agents visiteurs ou inspecteurs ciblaient particulièrement les femmes, suspectes de ne pas déclarer des situations de « vie maritale ». D’un côté, le gouvernement avait les ressources pour orchestrer une campagne médiatique et idéologique importante qui a eu pour effet de rallier une partie de la population, devenue même enthousiaste à dénoncer les présumées fraudeuses (et fraudeurs). De l’autre, les organisations se sont confrontées à la peur, la honte et l’isolement des personnes assistées sociales et un espace médiatique restreint, malgré la forte popularité du terme « boubou-macoutes ». À travers un travail politique, médiatique, mais surtout juridique et stratégique (alliances), le Front commun des personnes assistées sociales a su lutter jusqu’à l’arrêt des visites intrusives. Des actrices et acteurs de cette lutte viennent nous parler de la façon dont elles et ils s’y sont pris.e.s pour gagner malgré un rapport de force défavorable.